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« Hé venez voir, on a de nouveaux voisins ! »

Où les œuvres de la Galerie du temps font connaissance avec les nouvelles venues. Une proposition de Justine.

Pendant la période de fermeture, les équipes du Louvre-Lens ont travaillé pour proposer aux visiteurs des nouveautés en vue de la réouverture.

Les œuvres de la Galerie du temps ont ainsi eu la surprise de voir arriver de nouveaux voisins de cimaise. 


 

Ce sont des voisins bien différents de ceux dont elles ont l’habitude ! Leur apparence est parfois surprenante, certains sont en or et il y en a même un avec des cheveux sur la tête, de VRAIS cheveux ! Et il parait que tous ces objets viennent de très loin, de très, très loin ! Ils auraient fait de longs voyages à travers les océans…

Mais qui sont ces nouveaux personnages qui s’installent dans la Galerie du temps et d’où viennent-ils ? Nos œuvres se posent la question. Elles ne les ont jamais vus au musée du Louvre à Paris !

« Si, moi j’ai déjà vu des œuvres comme celles-ci ! » s’exclament en cœur le Jeune mendiant et l’Infante Marie-Marguerite.

« Ah bon ? » répondent toutes les autres œuvres de la Galerie du temps.

« Oui, continue l’Infante, un jour, elles sont passées devant nous. Elles se dirigeaient vers l’ascenseur, pour aller dans les salles qui se trouvent juste en dessous de celle où j’étais accrochée, et j’ai entendu un des employés du musée parler du Pavillon des Saisons, je crois. »

« Le Pavillon des Sessions ! » corrige une grande œuvre en bois sombre. « En effet, tu as raison, certaines œuvres comme nous sont exposées au musée du Louvre à Paris, dans le Pavillon des Sessions*.

 « C’est de là que tu viens toi ? » demandent, curieux, les personnages du tableau de la famille Dubuffe.

« Non, répond-elle, nous, nous venons toutes du musée du quai Branly – Jacques Chirac*. C’est un grand musée qui se trouve à Paris, comme votre musée du Louvre. Il est juste à côté de la Tour Eiffel, au bord de la Seine. La vue est magnifique ! »

« Notre musée est un jeune musée, plus jeune que le musée du Louvre à Paris, mais un tout petit peu plus vieux que le Louvre-Lens ! Il a ouvert ses portes en 2006. Il parle des arts et des civilisations non européennes d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques. »

Guinée, culture Baga
Vers 1850-1935
Masque féminin d’mba
Bois, fibres végétales, clous en laiton
© musée du quai Branly, photo Claude Germain

« Mais laissez-moi me présenter : je suis un masqueD’mba, je représente l’esprit de la fécondité et de la fertilité de la terre sous les traits d’une femme. Je viens de Guinée, un pays de l’Ouest de l’Afrique. J’étais utilisé par le peuple Baga et il fallait des hommes forts pour me porter, en effet je suis tout en bois et certains masques comme moi peuvent peser jusqu’à 50 kg.

Lors de cérémonies pour la récolte du riz ou bien pour les mariages, un homme me portait sur ses épaules. Il était caché sous une grande jupe en paille et ainsi je pouvais participer aux danses rituelles. J’aimais bien ces grandes fêtes ! Tout le village était là, il y avait des tambours, des chanteurs, des danseurs. Pour montrer ma joie, l’homme qui me portait me faisait dandiner de gauche à droite et quand on était au plus fort de la fête, il lui arrivait de me soulever le plus haut possible au-dessus de sa tête, et tous les villageois criaient ensemble « Ayo ! » C’était vraiment des moments très joyeux et inoubliables ! »

« Moi je viens du Louvre ! » s’exclame l’œuvre avec des cheveux. « Il y a longtemps, je me souviens, j’ai été exposé là-bas. C’était il y a presque 200 ans. À cette époque-là, le roi de France s’appelait Charles X et en 1827, il avait ordonné la création d’un musée de Marine et d’Ethnographie au musée du Louvre. »

« Charles X ? on le connait nous aussi ! interrompent les babouins, c’est à lui que nous avons été offerts par le gouverneur d’Egypte en 1830 ! »

« Je suis formel ! il n’y a jamais eu de musée de Marine et d’Ethnographie au musée du Louvre ! » s’écrie Napoléon d’un ton très solennel.

« Vous n’étiez pas encore arrivé à cette époque-là ! Vous n’êtes au Louvre que depuis 1982, lui répond Doña Isabel. Je me souviens très bien de cette époque. Nous avons découvert des maquettes de bateaux et des objets venus de l’autre bout du monde ! Mais cher ami, s’il vous plait, continuez, nous vous écoutons. Racontez-nous votre histoire. »

« Merci » répond l’œuvre à cheveux.

Nouvelle-Calédonie, culture Kanak
Vers 1850
Masque
Bois sculpté, fibres végétales, cheveux humains
© musée du quai Branly, photo Léo Delafontaine

« En effet, Madame, je viens de très loin. Mon pays a été appelé la Nouvelle-Calédonie par un marin anglais, un certain James Cook, qui y a accosté en 1774. Je suis originaire du nord de ce qu’on appelle la Grande Terre. Cette terre se trouve littéralement de l’autre côté de la planète, à 18 000 km d’ici. Il faut donc faire presque la moitié du tour de la Terre pour y arriver. Et à l’époque où j’ai fait le voyage pour arriver en France, les avions n’existaient pas ! Nous sommes partis en bateau à voiles pour un très long voyage de presque cinq mois à travers les mers et les océans. »

« Si je ne me trompe pas, vous aussi vous êtes un masque ? » demande le masque D’mba.

« Oui c’est ça. Mais je ne suis pas un masque de cérémonie joyeuse comme vous. Je suis un masque de deuil, j’étais utilisé lors des cérémonies en l’honneur d’un chef défunt. Mon peuple s’appelle les Kanaks. Chez nous, lorsqu’un chef décédait, des deuilleurs, les hommes responsables du deuil du mort, étaient choisis pour veiller sur la dépouille. Ils avaient alors interdiction de se couper les cheveux pendant tout le temps du deuil. Et pour des chefs très importants cette période pouvait durer dix ans ! À la fin de la période de deuil, une grande cérémonie était organisée, et c’est seulement à ce moment-là que les deuilleurs pouvaient se couper les cheveux. Avec leurs cheveux, ils ont fabriqué ma barbe et ma coiffure. Impressionnant, vous ne trouvez pas ! »

Tous acquissent, en effet très impressionnés.

Intriguée par son nouveau tout petit voisin, la Femme âgée demande : « Vous me paraissez bien petit pour avoir fait un si long voyage ? »

Colombie, culture Muisca
Vers 600 – 1600
Figurine votive représentant une victime sur un mât sacrificiel
Alliage d’or (tumbaga), fonte à la cire perdue
© musée du quai Branly – Jacques Chirac, photo Claude Germain

Le petit objet en or lui répond d’une toute petite voix : « J’ai fait un voyage un peu moins long, mais tout de même de 8 500 km, et je n’ai traversé qu’un seul océan, l’Atlantique. Je viens d’Amérique du Sud. J’ai été fabriqué dans les montagnes de l’Est de la Colombie, je suis un tunjo. Mon peuple, les Muiscas, vivait au bord d’un grand lac, le lac Guatavita. Ce lac était sacré dans notre religion, et lorsqu’un nouveau roi montait sur le trône, une grande cérémonie avait lieu. Le nouveau roi était recouvert d’or avant de se baigner dans le lac, et les villageois y jetaient de petits objets en or comme moi. De cette manière, les hommes nous offraient aux dieux pour que ces derniers soient bons avec le nouveau roi. Au 16e siècle, c’est en voyant cette cérémonie que les conquistadores espagnols ont commencé à imaginer la légende d’une cité en or appelée Eldorado. Beaucoup d’aventuriers sont venus ensuite dans l’espoir de trouver cette cité et ses montagnes d’or. »

« Hé bien mes amis, clame Marc-Aurèle, nous vous souhaitons la bienvenue dans la Galerie du temps. Nous sommes ravis de vous accueillir parmi nous et d’avoir toutes ces histoires passionnantes à écouter et à faire découvrir à nos visiteurs ! »

 

Pour aller plus loin :

*Le musée du quai Branly – Jacques Chirac. Ouvert en 2006, il rassemble les collections d’art d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques venues de différents musées : le musée de l’Homme, créé en 1937 et héritier du musée d’Ethnographie du Trocadéro et le musée national des arts d’Afrique et d’Océanie, ancien musée des Colonies fondé en 1931. Ainsi, plus de 370 000 objets sont rassemblés dans cette nouvelle collection, à laquelle s’ajoute des ensembles de photographies, de textiles et d’instruments de musique. Ces collections nous offrent un panorama des cultures, modes de vie et traditions des civilisations du monde entier.

Pour en savoir plus : https://www.quaibranly.fr/fr/

 

*Le Pavillon des Sessions du musée du Louvre regroupe un ensemble de 120 chefs d’œuvres d’art non-européen, venus d’Afrique, d’Amérique, d’Asie et d’Océanie. Il a été inauguré en 2000 par le président de la République Jacques Chirac, avec pour ambition de faire revenir dans ce grand musée universel des œuvres du monde entier. Le Pavillon des Sessions fait écho à la création du musée de Marine et d’Ethnographie du Louvre ordonnée par le roi Charles X en 1827. Après avoir fasciné le public durant une bonne partie du 19siècle, les objets du musée d’Ethnographie du Louvre prennent le chemin de différents musées entre la fin du 19e siècle et le début du 20e siècle, dont le nouveau musée d’Ethnographie du Trocadéro, créé en 1878. Au fil du 20e siècle, l’idée du retour de ces œuvres fait son chemin, avec le souci de mettre en relation les chefs d’œuvre de l’art occidental et ceux du monde entier.

Aujourd’hui, l’accueil de ces œuvres au Louvre-Lens est une perpétuation logique de cette idée. Avec sa scénographie décloisonnée, dans laquelle les œuvres se rencontrent, le musée ouvre la porte à un dialogue entre les civilisations et les cultures à travers les âges, rassemblant ainsi un patrimoine universel.

Pour en savoir plus :  https://www.louvre.fr/decouvrir/le-palais/aux-quatre-coins-du-monde

 

Références de l’œuvre figurant en entête de l’article :

Guinée, culture Baga
Vers 1850-1935
Masque féminin d’mba
Bois, fibres végétales, clous en laiton
Musée du quai Branly – Jacques Chirac
Crédits de la photographie : Masque d’mba installé dans la Galerie du Temps du musée du Louvre-Lens, mai 2021, © JC