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Saint Georges, ce héros

Alicia met en lumière le combat héroïque représenté sur cette icône byzantine.

Parmi les œuvres exposées dans la Galerie du temps, vous pouvez admirer cet objet de forme circulaire en mosaïque d’une extrême finesse d’exécution. La minutie de la réalisation, la riche polychromie et l’éclat de l’or rappellent les miniatures enluminées de l’époque médiévale. La scène de combat représentée sur l’objet semble familière et correspond à notre imaginaire collectif sur le Moyen Âge : elle montre un chevalier en armure combattant un dragon. Toutefois, il ne s’agit pas d’un simple chevalier, mais d’un saint, reconnaissable au nimbe qui lui entoure la tête. Le saint n’est pas identifié par une inscription, mais sa représentation est très similaire à l’iconographie connue de saint Georges de Lydda, saint patron des chevaliers.

Icône : saint Georges terrassant le dragon, vers 1300-1350, Constantinople, mosaïque.
© RMN – Grand Palais (Musée du Louvre) – Daniel Arnaudet

 

Une icône byzantine portative

L’objet est une icône (image d’une figure religieuse) portative de 22 cm de diamètre. Sa taille réduite permet de le transporter facilement et de garder sur soi l’image du saint. Cette icône date de la première moitié du 14e siècle et a été réalisée à Constantinople, à l’époque de la dynastie des Paléologues qui règne sur l’Empire byzantin de 1261 à 1453.

Les icônes transportables en mosaïque sont typiques de l’art byzantin. Le culte des images apparaît dès le 7e siècle dans cet empire et se généralise ensuite dans l’Orient chrétien. Les gens pensent alors que les icônes des saints peuvent, à l’instar des reliques, accomplir des miracles. Ces objets sont donc très précieux et vénérés.

Un art de la minutie

L’art de la mosaïque connaît son plein essor à Constantinople entre le 6e et le 15e siècle. Il sert notamment à décorer les édifices religieux. Les tesselles en pâte de verre colorée qui recouvrent l’icône sont de très petites dimensions, à peine visibles à l’œil nu. Le style mêle la tradition de l’art byzantin (mosaïque, dorure, traits antiquisants du visage) et l’influence de l’art gothique à son apogée durant les 13e et 14e siècles en Occident (modelé, effets de mouvement, paysage naturel).

Un combat héroïque avec un dragon

L’histoire de saint Georges est racontée dans La légende dorée de Jacques de Voragine, un ouvrage du 13e qui est le plus célèbre texte hagiographique* du Moyen Âge.

D’après ce récit, Saint Georges (vers 280-303), un officier de l’armée romaine, arrive à Silène en Lybie où les habitants sont terrorisés par un terrible dragon, auquel ils doivent régulièrement offrir des jeunes gens à dévorer. Ces derniers sont tirés au sort pour être sacrifiés au dragon. Or, saint Georges apprend que la princesse de la cité est la prochaine victime. Il décide d’affronter le dragon et le blesse à l’aide de sa lance. La demoiselle en détresse est sauvée. L’horrible créature est vaincue, capturée et devient, selon Jacques de Voragine, aussi docile qu’un chien !

L’histoire de saint Georges est une allégorie de la victoire de la foi chrétienne sur le mal. Le saint, qui tient sa force de Dieu, est un héros complet, un modèle qui possède à la fois des qualités morales et guerrières.

Comment la puissance du preux chevalier est-elle exprimée dans l’image ?

Il n’est pas évident de représenter une scène d’action dynamique sur un support aussi petit. La forme en médaillon de l’icône, cerclée d’or, de blanc et de rouge, confère de l’énergie à l’image. L’ensemble de la scène est très animé. Saint Georges est représenté en action, levant le bras pour brandir sa lance afin de frapper la gueule du dragon. Il est monté sur un cheval à la robe blanche pommelée en position cabrée. Des lignes diagonales rythment la composition (lance, corps du cheval). Saint Georges n’a pas de heaume, mais est auréolé d’un nimbe doré orné de points blancs qui le désigne comme un chevalier chrétien. Il porte une armure et une cape rouge soulevée par le vent, aux drapés artificiels. Or, le pourpre est un symbole de pouvoir depuis l’Antiquité. Cette couleur souligne l’importance du saint et lui donne une allure majestueuse. La blancheur du cheval n’est pas un hasard. Au Moyen Âge, le blanc est la couleur de la pureté et celle des martyrs. Saint Georges mourra d’ailleurs en martyr, exécuté sur les ordres de l’empereur Dioclétien pour avoir refusé d’abandonner sa foi. De plus, le saint est représenté dans la partie supérieure de l’image, tandis que le dragon occupe la partie inférieure. Le ciel est situé derrière le chevalier, ainsi associé au monde céleste et spirituel. La teinte verte du fond donne un aspect surnaturel à la scène. Par ailleurs, quelques éléments liés à saint Georges sont légèrement hors cadre : une extrémité de la lance, une partie du nimbe et un sabot du cheval. Dans l’art médiéval, le hors-champ est souvent employé pour rendre l’image plus vivante en renforçant l’impression de mouvement et pour signifier le caractère hors normes d’un personnage.

À l’inverse du saint, tout est fait pour rabaisser le dragon, symbole du mal. La créature censée être effrayante paraît ridiculement petite et est piétinée par le cheval, ce qui annonce sa défaite. La silhouette du dragon se superpose au sol rocheux car il est lié au monde terrestre et matériel. Le monstre déploie ses ailes rouges comme le feu, ondule son corps vert qui ressemble à celui d’un serpent et agite des pattes griffues telles des serres de rapace. L’hybridité reflète le caractère malfaisant du dragon qui sème le désordre et le chaos.

Ainsi, l’image pieuse du saint chevalier sert avant tout à exalter la force de l’Église qui triomphe sur le paganisme.

 

* Texte hagiographique : Texte relatant des vies de saints.