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Ne souriez pas !

Un parcours de la Galerie du temps avec Joffrey, puis sa version Facile À Lire et à Comprendre !

Ne souriez pas !

Avez-vous déjà eu l’impression de ne pas être à votre place dans un musée ?

En y regardant de près, nous sommes observés, dans les salles, par plein de personnages très sérieux, qu’on a parfois l’impression de déranger.

Pourquoi les gens sourient-ils si peu, ou si timidement, sur les œuvres d’art ?

Parcourons la Galerie du temps…

Pour les rois ou les empereurs, cela peut se comprendre : le roi devient roi parce qu’il appartient à une dynastie et/ou devient roi « de droit divin » (autrement dit « par la volonté divine ») ; c’est le cas de Gudea, Marc-Aurèle, ou encore Louis XV.

Girsu (aujourd’hui Tello), Mésopotamie (Iraq actuel), Gudéa, prince de l’État de Lagash, vers 2120 avant J.-C. diorite, H. 70,5 ; L. 22, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / René-Gabriel Ojéda

 

Rome ?, Italie, Marc Aurèle, empereur romain (161-180 après J.-C.), vers 160 après J.-C., marbre H. 2,10 m, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / Philippe Fuzeau

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

D’après Edme Bouchardon Chaumont (France), 1698 – Paris (France), 1762, Louis XV, roi de France (1715-1774), à cheval en costume romain, vers 1759-1763, bronze H. 71 ; l. 23,5 ; pr. 50 cm, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / Pierre Philibert

 

Ainsi, sont-ils soit destinés au divin (Gudea), soit à faire connaître le détenteur de l’autorité de droit divin (Marc-Aurèle, Louis XV).

On peut cependant noter que ces tendances peuvent varier rapidement : Pompée – grand ami et rival de César, deux siècles à peine avant Marc-Aurèle – avait fait placer un portrait souriant de lui dans un théâtre qu’il avait fait construire, justement parce qu’il cherchait à s’attirer la sympathie du peuple de Rome.

Pour d’autres, comme le compositeur Cherubini, faire la tête faisait partie de leur personnalité, c’est là leur vrai visage.

Jean-Auguste-Dominique Ingres, Montauban (France), 1780 – Paris (France), 1867 Henri Lehmann, Kiel (Allemagne), 1814 – Paris (France), 1882, Portrait du compositeur Luigi Cherubini (1760-1842) béni par la muse de la poésie lyrique Terpsichore, 1840-1842, huile sur toile, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / Christian Jean

 

Sauf que le sourire, est un élément compliqué : fugace, il apparaît et disparaît en un clin d’œil, difficile à saisir pour l’artiste. L’expression du Kouros illustre bien ce qui se passe si vous demandez au modèle de tenir son sourire : la crampe n’est pas loin, et le naturel est déjà parti… Sans oublier qu’à cette époque archaïque, l’artiste ne cherche pas encore le réalisme absolu, il demeure dans une recherche d’idéalisation, surtout dans les œuvres rattachées au divin.

Paros (île des Cyclades), Grèce, Jeune homme nu (couros), statue provenant du sanctuaire d’Asclépios, dieu de la Médecine, vers 540 avant J.-C., marbre, H. 1,03 m, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / Daniel Lebée et Carine Deambrosis

 

Par ailleurs, le sourire est un acte qui fait intervenir plus de quinze muscles du visage : la bouche bien sûr, mais aussi le front, le nez, les yeux, les joues et même les oreilles ! Le comprendre demande une étude rigoureuse qui, au 17e siècle, faisait déjà l’objet de cours, donnés par Charles Le Brun à l’Académie royale de peinture et de sculpture.

Et pourtant, quand on cherche bien…

En Égypte Antique et au Moyen-Âge européen par exemple, le sourire réapparaît fortement lors des périodes de prospérité économique et de stabilité politique.

En Égypte, sous le règne de Psammétique II, pendant la 26e dynastie (dite période saïte), on fait appel à des formes prestigieuses du passé, qui mettent en avant la beauté du corps et symbolisent le renouveau du pays.

Égypte, Le pharaon Psammétique II (595-589 avant J.-C.), vers 590 avant J.-C., pierre, H. 83,5 ; l. 15 ; pr. 37,7 cm, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / Georges Poncet

 

Tandis qu’au 17e siècle, époque de croissance économique et démographique en Europe, on cherche à mettre en avant l’individu (sous l’influence entre autres des études philosophiques menées à l’université de Paris), d’où le développement de la pratique du portrait, auparavant « fortement déconseillée » par l’Église, comme celui de Blanche de Champagne.

Limoges, France, Gisant de Blanche de Champagne (morte en 1283), épouse de Jean Ier, duc de Bretagne, vers 1306, cuivre sur âme de bois (noyer), L. 2,05 ; l. 0,50 ; ép. 0,24 m, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / René-Gabriel Ojéda

 

Dans ces deux cas, on note une volonté de mettre en avant la beauté.  Avec la forte présence du sourire, elle peut être vue, parmi d’autres raisons, comme la « confiance en son époque ».

Le sourire de Blanche est aussi celui de la confiance et de la sérénité, qui a fait son retour dans les arts chrétiens au Moyen âge, essentiellement sur les vierges à l’enfant, où Marie devient une figure apaisante pour le fidèle.

Nevers, France, Vierge à l’Enfant, provenant d’une léproserie, vers 1350-1375, pierre calcaire polychrome, H. 1,10 ; l. 0,44 ; pr. 0,34 m, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / Tony Querrec

 

Mais ce sourire reste timide :  la bouche est fermée. Dans le monde chrétien occidental, il ne faut pas montrer pas ses dents : elles sont une de nos dernières armes, elles sont un rappel de notre bestialité. Aujourd’hui encore, mordre est un acte vil, réprimé dès l’enfance, qui ne saurait être toléré, même lors des matchs de boxe (pour mémoire, Mike Tyson arrachant avec ses dents un morceau d’oreille de son adversaire Evander Holyfield, geste horrifiant les États-Unis…)

Celui qui montre les dents est une bête sauvage, en témoigne le chapiteau de la cathédrale Notre-Dame-des-Doms, où le monstre exhibe ses dents pour effrayer les mauvais esprits.

Avignon, France, Chapiteau décoré de rinceaux perlés, de feuillages et d’une tête de monstre, provenant du cloître détruit de la cathédrale Notre-Dame-des-Doms, vers 1170, marbre, H. 30 ; l. 25 ; pr. 26 cm, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre) / Stéphane Maréchalle

 

Certains se rappelleront Le pied-bot de Ribera, autrefois présent dans la Galerie : c’est vers la fin du 16e siècle que les sourires « ouverts » font leur retour (Caravage, Frans Hals), mais ils sont alors le fait des ivrognes et des parias, dont l’hygiène dentaire laisse à désirer. C’est à l’époque un signe de mauvaise vie, qui choquait déjà Ovide dans l’Antiquité. À noter cependant que dans d’autres cultures, les dents noires peuvent avoir une valeur différente : au Japon, les geishas se noircissaient les dents, comme une marque d’élégance.

Il faudra attendre la seconde moitié du 20e siècle pour qu’Hollywood popularise le sourire que nous connaissons. Avant cela, le mot d’ordre devait être « Ne souriez pas ! Faites la tête, c’est plus sûr. »

 

Et voici maintenant la version FALC !

 

Parfois, on a l’impression de déranger dans un musée.

Des tas de personnages nous observent.

Ils sont très sérieux.

Pourquoi les gens sourient-ils peu sur les œuvres d’art ?

Ceux qui ne sourient pas

Gudea, Marc-Aurèle, Louis XV étaient des rois.

Ils n’avaient pas besoin de se faire élire.

Ils n’avaient pas besoin de se faire aimer.

Ils n’avaient pas besoin de sourire.

Pompée est un politicien de la Rome Antique.

Il défend la République.

Il a placé ce portrait souriant dans son théâtre.

Il veut se faire aimer des Romains.

Le compositeur Cherubini ne souriait pas beaucoup.

C’était quelqu’un de très sérieux.

Il n’aimait pas sourire.

Ingres représente son vrai visage.

Un sourire, c’est difficile

Peindre ou sculpter un sourire, c’est compliqué.

Un sourire ne dure que quelques secondes.

Sans photo, c’est difficile de comprendre comment ça marche.

Il faut plus de quinze muscles pour sourire.

Ce sont les muscles de la bouche, des joues, du nez, des yeux, du front et des oreilles.

Il faut beaucoup étudier pour comprendre un sourire.

Le peintre Charles Le Brun donne déjà des cours sur le sourire il y a 300 ans.

Le sourire du Kouros n’a pas l’air naturel.

La personne qui a servi de modèle a souri très longtemps.

Ceux qui sourient

Le roi Psammétique 2 sourit parce tout va bien en Égypte.

Blanche de Champagne sourit parce qu’elle est heureuse.

Les artistes montrent aussi qu’ils sont beaux et élégants.

Sur les sculptures du Moyen Âge, c’est surtout la Vierge Marie qui sourit.

On la représente souvent avec son enfant Jésus dans les bras.

Son sourire est apaisant.

Elle demande aux croyants d’avoir confiance en Dieu.

Les dents

Les personnages sourient souvent la bouche fermée.

En Europe, dans le passé, on ne devait pas montrer ses dents.

On peut s’en servir pour mordre.

Il ne faut pas mordre.

On pense que si on mord, on se comporte comme un animal.

On apprend aux enfants à ne pas mordre.

 

Au Moyen Âge, les gens croient beaucoup aux fantômes.

Sur ce morceau de colonne de l’église Notre-Dame-des-Doms, le monstre montre ses dents.
Le monstre veut faire peur aux fantômes.

Avant dans la Galerie du Temps, il y avait un tableau peint par Ribera.

Ce tableau représente un mendiant qui sourit.

Il montre ses dents.

Il est pauvre.

Ses dents ne se sont pas en bon état.

En 1642, il n’y a pas de dentifrice.

Les gens ne prennent pas bien soin de leurs dents.

Les gens ne veulent pas montrer qu’ils ont de mauvaises dents.

Donc ils sourient la bouche fermée.

Le sourire aujourd’hui

Dans les années 1950, on photographie beaucoup les vedettes de cinéma.

Dans les années 1950, on utilise beaucoup de dentifrice.

Dans les années 1950, on a de bons dentistes.

Les vedettes de cinéma sourient en montrant leurs dents blanches.

C’est le sourire qu’on connaît aujourd’hui.

Conclusion

Avant c’était difficile de peindre ou sculpter un sourire.

Avant les dents n’étaient pas toujours propres.

Les gens voulaient un portrait réussi.

Alors les gens ne souriaient pas beaucoup.

Ils étaient sûr comme cela que leur portrait serait réussi.